Lettera Amorosa
L’ensemble de mon travail de compositrice puise et s’assume dans un prolongement de la tradition des formes et du langage de la musique tonale élargie du XXème siècle.
Initiée depuis mes quatorze ans par Nicolas Bacri à l’organicité, l’équilibre entre le contrepoint et l’harmonie dans la forme, j’ai peu à peu forgé mon identité autour d’un langage poétique influencé par d’autres arts (notamment la peinture moderne et contemporaine et la poésie française d’après-guerre). Ainsi, mon Quatuor avec flûte Lettera Amorosa s’inspire de la littérature en tirant son nom du recueil homonyme de René Char, lui-même influencé par le madrigal de Monteverdi.
Ce premier disque est pour moi l’occasion de revisiter six ans de composition, en choisissant six titres parmi mes dix premiers opus. Au moment où j’écris cette présentation du disque, en janvier 2022 (durant l’écriture de mes opus 16 et 17), j’ai conscience d’entrer dans une deuxième période de composition, où mon langage évolue : j’accorde désormais plus d’importance à la notion de « geste musical » et travaille à intégrer la dissonance comme outil d’expression.
Ouvrant le disque, les Quasi Variazioni, Op.7, marquent un tournant dans l’évolution de ma première période de composition. J’ai porté, au contact de mon premier instrument, pour la première fois, un regard plus abstrait sur mon utilisation de l’harmonie, désirant la rendre plus distendue et éloignée de la tonalité telle que je l’employais dans mes premiers opus.
Vient ensuite la Sonate pour violon et violoncelle, Op.8, première œuvre que j’ai composée pour le violon. L’enregistrer moi-même me replace dans un rôle d’interprète-compositeur, où les deux facettes s’influencent mutuellement. L’écriture y est lyrique et d’inspiration française, en souvenir de la musique de Maurice Ravel qui m’est très chère. A travers les deux mouvements contrastés qui constituent cette sonate, la fusion des deux instruments à cordes se développe et s’intensifie jusqu’aux portes de l’illusion sonore d’un trio à cordes, par l’emploi extrêmement présent de doubles cordes.
Ces deux premières œuvres du disque, composées à la même période, forment un diptyque que je souhaiterais présenter en miroir des trois œuvres qui suivent, autour de la flûte.
Profondément marquée par le Requiem de Maurice Duruflé, j’ai composé mes Impressions Liturgiques Op.2 pour flûte et piano à l’âge de quinze ans. C’est avec cette œuvre que mon intérêt pour la composition pour flûte a grandi et m’a amenée à composer Mosaïque et Lettera Amorosa notamment.
Mosaïque Op.4, composée à la table, présente un duo fusionnel entre la flûte et la clarinette en trois brefs tableaux aux couleurs tantôt nostalgiques tantôt rêveuses, concluant par un finale espiègle et virtuose.
Pour terminer le triptyque autour de la flûte, le quatuor Lettera Amorosa, Op. 10, qui donne son nom au disque, fait interagir la flûte et le trio à cordes. Composé de quatre mouvements, le quatuor reflète les différents élans que m’ont évoqués les phrases des quatre poèmes de René Char.
Enfin, un hommage à Nicolas Bacri avec mes 12 Préludes pour piano, Op.1, que j’interprète moi-même. Reflets d’une première période aux diverses facettes, les Préludes évoluent déjà vers une matière sonore où la poétique musicale personnalise mon langage musical. Le dernier Prélude, le plus long et le plus tourmenté, se tourne vers une écriture plus chromatique, annonçant mon Poème, Op.5.
En interprétant trois de mes œuvres, j’ai eu le bonheur, pour les œuvres de musique de chambre, d’être rejointe par des musiciens extraordinaires qui ont insufflé leur âme et leur personnalité à ma musique. Merci à Dana, Caroline, Hermine, Ionel, Joë et Paul pour leur amitié, leur talent et leur engagement. Notre expérience musicale commune ainsi que notre attachement à la musique contemporaine, et notamment le rapport engagé que nous entretenons tous à la création, font de ce disque un symbole puissant pour moi, une première étape marquante de ma vie de compositrice.
Elise Bertrand
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1. Quasi Variazioni Op. 7
pour piano (2018) - Ed. Klarthe
2-3. Sonate pour violon et violoncelle Op.8
(2018) - Ed. Billaudot
4-7. Impressions liturgiques Op.2
pour flûte et piano (2016) - Ed. Billaudot
8-10. Mosaïque Op.4
pour flûte et clarinette (2016-17) - Ed. Klarthe
11-14. Lettera Amorosa Op. 10
pour flûte et trio à cordes (2019-20) - Ed. Billaudot
15-26. 12 Préludes Op. 1
pour piano (2015-16) - Ed. Klarthe
Dana Ciocarlie - piano (1.)
Caroline Debonne - flûte
Ionel Streba - piano (4-7.)
Hermine Horiot - violoncelle
Joë Christophe - clarinette
Paul Zientara - alto
Elise Bertrand - violon et piano (15-26.)
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